Requiem

Giuseppe Verdi (1813 – 1901)

Pour l’oeil et pour l’oreille :
Concert du Requiem de Verdi à Champigny
par le Chœur des Abbesses, 21/11/2021

Viva Verdi !

Une expression à la gloire du musicien

Cette expression à la gloire du musicien était placardée dans la péninsule italienne en cours d’unification. Les partisans de l’unité, dont Verdi faisait partie, avaient trouvé ce moyen d’affirmer leurs convictions sans trop de risque. Lisez Viva V.E.R.D.I. « Viva Vittorio Emanuele Re D‘Italia ». La botte était alors morcelée en une dizaine d’états et la Lombardie dominée par les Autrichiens.

La messe de requiem de Verdi est lié au sentiment national, le compositeur a 60 ans en 1873, il a été député puis sénateur et exalte la réunification menée à bien par Victor Emmanuel, Cavour et Garibaldi en 1871.

Un « opéra en habit ecclésiastique » ?

Ce jugement sévère du chef d’orchestre Hans von Bulow est un peu court pour décrire l’œuvre monumentale. Bulow souligne l’absence d’épurement propre à la liturgie luthérienne et présentera ensuite ses excuses.

Genèse de l'œuvre

Lors de la disparition de Rossini en novembre 1868, Verdi avait lancé la composition d’une messe des morts en son hommage. Les grands musiciens italiens devaient assurer chacun une partie, et Verdi le Libera me, l’absoute qui conclut la messe. L’œuvre était achevée en septembre 1869 mais ne fut jamais exécutée en raison de complications administratives.

Le 22 mai 1873 survient la mort de Manzoni, écrivain, poète et gloire nationale consacrée par Victor Emmanuel II et dont la disparition en tant qu’ami et symbole du «Risorgimento» avait profondément affecté Verdi. Il décide de reprendre seul la composition d’un requiem à partir de son Libera me. Ce sera chose faite le 22 mai 1874 pour le premier anniversaire du décès, lors d’une création dirigée par le maître à l’église San Marco de Milan. Les femmes choristes, exceptionnellement admises à chanter dans l’église de rite ambrosien (propre à l’église milanaise depuis la fin du IVe siècle), devaient être voilées de noir. Trois jours après, reprise au Teatro alla Scala puis à l’Opéra Comique de Paris dans les deux mois. Pour la première britannique, Verdi dirigea 150 instrumentistes et 120 choristes à l’Albert Hall de Londres, le 15 mai 1875.

Un requiem empreint de figuralisme

Le Libera me constitue la matrice de l’œuvre et renvoie à des parties de la messe qui évoquent fortement le Jugement dernier, dans l’Introït qui débute la messe et le Dies Irae qui le suit. Tout comme chez Berlioz, les fanfares de trompettes précèdent une puissante explosion de tout l’orchestre et des hommes du chœur. Verdi avait lu les « Requiem » de Mozart, Cherubini et Berlioz durant l’été 1873.

Fragilité évoquée de la vie terrestre, tourbillon traversé à contretemps par le tonnerre de la grosse caisse, maîtrise du flux et du reflux des émotions entre les suppliques pressantes de salut et le ton pénitentiel de l’Agnus Dei, la musique illustre avant tout les craintes de damnation et les espoirs des vivants.